532 milliards de tonnes de glace disparues en 2019, l’équivalent de 6 piscines olympiques remplies par seconde.¹ Ce chiffre effrayant est celui de la fonte des glaciers uniquement au Groenland. Pour que la situation n'empire pas, les chercheurs explorent les solutions à notre disposition, même les plus inattendues.
© UN / Mark Gruten
Des prévisions qui doivent alerter
Tous les rapports vont dans le même sens : la situation est dramatique. Pour l’année hydrologique 2022/2023, l’ensemble des glaciers de référence à travers le monde a subi la plus grande perte de glace jamais constatée. Les glaciers suisses ont perdu 10 % de leur volume sur les deux dernières années alors que l’ouest de l’Amérique du nord a subi une perte à un rythme cinq fois supérieur aux vitesses enregistrées entre 2000 et 2019. Les records en ce qui concerne la chaleur des océans mais aussi de l’élévation du niveau de la mer ont été battus. Un nouveau rapport estime que la quantité de glace amenée à disparaître est plus importante que celle initialement prévue par le GIEC. D’ici 2100, entre un quart et la moitié du volume des glaces est voué à fondre. L’estimation la plus basse s’appliquera si le “zéro émission nette” est atteint d’ici 2050. Mais, « les engagements pris par les gouvernements jusqu’à présent sont loin d’être suffisants. La mise en œuvre des plans nationaux actuels en faveur du climat – pour les 193 Parties à l’Accord de Paris – entraînerait une augmentation considérable de près de 14 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre d’ici à 2030, par rapport aux niveaux de 2010 » souligne l’ONU.
Conséquences dramatiques
Les conséquences liées à la fonte de ces glaciers inquiètent de plus en plus. En Alaska, où la glace couvre 85 % du territoire, les routes et habitations s’affaissent sous l’effet des mouvements du sol. « Là où il y avait dans le sol de la glace qui avait un rôle structurant, il y a du vide. Et ce vide, à un moment donné, est tellement important que le sol s’effondre »³, explique Hélène Genet, professeur en écologie en milieu arctique. Autre inquiétude, le permafrost. Cette couche de glace pourrait ramener, à la surface de la terre, des virus inconnus des chercheurs. Un scénario loin d’être de la science-fiction. En 2016, un jeune homme est mort au nord de la Russie de l’anthrax qui avait disparu 70 ans plus tôt. Les scientifiques ont alors émis l’hypothèse que la bactérie s'était échappée suite au dégel d’un cadavre de renne mort de la maladie plusieurs dizaines d'années auparavant. Au-delà du risque sanitaire, la fonte du permafrost entraîne l'émission de dioxyde de carbone et de méthane, deux gaz à effet de serre qui accélèrent le réchauffement climatique. Autre problématique : l’élévation du niveau de la mer liée à la fonte des glaciers. Ils ont déjà fait monter son niveau de presque 1,3 centimètre au cours des 20 dernières années. Selon les estimations du GIEC et dans le pire des scénarios, ce phénomène devrait aller en s’amplifiant pour arriver à un mètre d’ici 2100.
Des pistes pour inverser la tendance
Développer la recherche sur la géo ingénierie glaciaire. C’est ce que proposent des dizaines de glaciologues et chercheurs dans un rapport publié par l’université de Chicago en juillet dernier. L’idée ? Étudier scientifiquement si la géo ingénierie pouvait être la solution. « Cela nous prendra 15 à 30 ans d’en apprendre assez pour recommander ou éliminer chacune de ces interventions [de géoingénierie] »⁴, souligne John Moore, professeur au Centre arctique de l’université de Laponie et co-auteur du rapport. Deux pistes paraissent particulièrement réalistes. La première consisterait à creuser plusieurs trous dans les glaciers polaires sur des centaines de mètres d’épaisseur pour récupérer l’eau sous forme liquide et la re-geler à la surface. La deuxième, quant à elle, verrait le déploiement de rideaux souples déployés au fond de l’océan, le long des glaciers pour dévier les courants d’eau chaude présents en profondeur qui accélèrent la fonte des glaciers. Ce sont trois chercheurs qui ont émis cette hypothèse mettant notamment en avant le moindre coût de cette solution qui pourrait stabiliser la fonte des glaces dont ceux de Pine Island et Thwaites, situés en Antarctique Ouest, au cours des prochaines siècles. L’installation de tels rideaux est estimée de 40 à 80 milliards de dollars, s’y ajoute 1 à 2 milliards de dollars par an alors que la protection du littoral mondial revient à 40 milliards de dollars par an.⁵ Sur le sujet de la géo ingénierie, la communauté scientifique est largement divisée, certains pointent notamment du doigt le techno-solutionnisme et plus largement le risque de mettre de côté la nécessité de réduire nos émissions de gaz à effet de serre…
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