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Plan Quartier 2030 : recréer du lien social

Sur fond d’émeutes urbaines durant l’été 2023, la politique de la ville opère une profonde mutation. Sabrina Agresti Roubache, nouvellement élue, comme secrétaire d’Etat chargée de la ville, précise dans un édito : « Ensemble, nous pouvons faire nation et bâtir un avenir meilleur pour nos quartiers ». Telles sont donc les ambitions de ce projet lancé par le gouvernement d’Emmanuel Macron : une réforme radicale de la ville sur le modèle des quartiers pilotes inaugurés à Marseille à l'été 2021, une refonte des zonages des quartiers populaires en étroite collaboration entre élus, spécialistes, maires et habitants, un renouvellement de la pensée des Quartiers Prioritaires de la Politique de la ville (QPC) comme faisant partie intégrante du paysage français.


Par Margaux Bastien

© VVVCFFrance



Combattre les inégalités à la racine


À l'été 2021, en visite dans la cité phocéenne, le Président lance le projet « Marseille en Grand » amorçant des mesures ambitieuses et innovantes en faveur des quartiers. Deuxième ville de France, Marseille apparaît comme un laboratoire privilégié pour le test de nouvelles politiques publiques. Le 26 et 28 juin 2023, il annonce le deuxième acte du Plan « Marseille en Grand » amorçant sur la même lancée le lancement du Plan Quartier 2030.


Face aux déséquilibres d’égalité des chances observés entre les quartiers et le reste du territoire, le plan Quartier 2030 ambitionne de combler les écarts. Le modèle s’articule autour de 7 priorités : sécurité, social, sanitaire, éducation, emploi, culture et transports. Un enjeu à la clé : faire en sorte que « le logement ne soit pas la bombe sociale de demain » pour reprendre les mots d’Olivier Klein, ancien ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Le Plan Quartier 2030 annonce des moyens financiers supplémentaires qui seront accordés aux quartiers populaires, concernant l’éducation et les infrastructures sportives avec un nouveau plan de rénovation/construction de 5000 équipements sportifs. Les enfants pourront être admis dès l’âge de 2 ans à l’école, et auront la possibilité dès 2027 de bénéficier d’un accueil dans les QPV afin de bénéficier de l’aide aux devoirs, aux activités sportives et culturelles. Les classes prépa intégrées aux grandes écoles seront renforcées afin d’accueillir une plus grande mixité sociale.

La lutte contre les discriminations à l’emploi fera l’objet d’une surveillance accrue de la part des institutions afin de favoriser l’égal accès à l’emploi. 50000 entreprises seront mobilisées pour le retour vers l’emploi des habitants. D’ici 2027, le gouvernement ambitionne de pousser à la création de 100000 nouveaux entrepreneurs dans les QPC.

Enfin, la réhabilitation des logements, la rénovation thermique et la construction de logements supplémentaires permettront d’accueillir plus dignement les populations.



Un échec de la politique des QPV ?


Selon l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) 1514 quartiers sont à dénombrer dans l’Hexagone et en outre-mer, comptabilisant 5,4 millions de personnes, soit 8% de la population globale. Or, sur les 597 millions d’euros votés par le Parlement en 2023 dans le cadre du projet de loi des finances, seul 110 euros par résident est alloué dans les QPV. Ils bénéficient d’une aide de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) visant à rénover ces quartiers. Sur les 12 milliards d’euros du nouveau programme national pour le renouvellement urbain, seuls 1,2 milliard seront financés par l’Etat, le reste provenant d’Action Logement, premier groupe de logements sociaux en France, qui lui-même tire ces revenus des cotisations des entreprises et de l’Union Sociale pour l’habitat, dont les organismes HLM à hauteur de 2,4 milliards.


Selon le Rapport Borloo paru en 2018 dans les quartiers « les communes ont plus de besoins mais moins de ressources : elles disposent de 30% de capacité en moins. » Les résidents sont souvent moins diplômés, plus fréquemment au chômage, dans des professions moins rémunératrices et stables, donc cotisent moins. Sans oublier le besoin d’accompagnement scolaire, social et sportif d’une population jeune plus important. Dès lors, les résidents, qui connaissent une ascension sociale, ont tendance à quitter ces quartiers à la recherche d’une meilleure égalité des chances au profit d’une population plus paupérisée.


Les dotations de l’Etat atteignent 267,90 euros par habitant contre 145,71 euros dans d’autres communes, mais les recettes des communes en QPV sont moins dynamiques. Ainsi, ne suffit-il pas d’arroser massivement les QPV de moyens financiers mais « de comprendre ce qui se passe dans ces quartiers dynamiques et investir au bon moment, au bon endroit. » souligne l’essayiste Hakim El Karoui, ancien conseiller à Matignon.



Une gouvernance partagée entre les acteurs locaux


L’élaboration des nouveaux contrats de ville « Engagements Quartiers 2030 » envisagent la participation des habitants et les différents acteurs à la concertation en cours. Deux modalités ont donc été pensées par le gouvernement : une plateforme numérique « Quartier 2030 » et des rencontres publiques organisées dans les différents quartiers. Cette initiative est l’aboutissement de la Commission participation « citoyen quartiers » présidée par Mohamed Mechmache, fondateur et porte-parole des collectifs Association collectif liberté égalité fraternité ensemble unis (ACLEFEU) et Pas sans Nous. Durant 100 jours, jusqu’à mi-juillet 2023, Monsieur Mechmache, accompagné d’élus et professionnels du monde associatif, s’est déplacé dans tout le pays pour rencontrer et échanger sur l’avenir des quartiers prioritaires. Des échanges qui ont pour but de rétablir le dialogue entre les quartiers et l’ensemble des acteurs de la politique de la ville.


Une actualisation des zonages de quartiers sensibles sera envisagée en collaboration avec les élus locaux pour que la réalité « colle avec le territoire ». Le ministère de la transition écologique et de la Cohésion des territoires se donne l’objectif de créer des « outils locaux souples, adaptables et au plus proche des besoins. »


Sous la houlette du ministère de la transition écologique, ces rencontres se tiendront ainsi jusqu’au 31 octobre. En novembre et décembre prochains, les résultats de cette concertation seront examinés par le gouvernement pour finaliser les nouveaux contrats de ville « Engagements Quartiers 2030 » avant le 31 mars 2024.



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