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A quand une mobilisation générale pour la protection des mineurs en ligne ?

Dépasser les querelles et soutenir des associations comme Point de Contact est essentiel, ne nous trompons pas de combat !



40 000 euros.

 

C’est tout ce qu’il manquait à Point de Contact pour poursuivre sa mission au service d’un Internet plus sûr pour tous. Point de Contact, ce sont en 2023 près de 28 000 signalements de contenus illicites en ligne, de la pédo-criminalité aux violences sexuelles en passant par la discrimination, les discours de haine ou l’incitation au terrorisme. Une mobilisation de tous les instants qui fait de l’association la 2ème hotline européenne et le premier signaleur auprès de PHAROS de contenus pédo-criminels, fléau de l’ère digitale. 


Et pourtant, la survie de Point de Contact est en jeu.


En cause ? On peut citer bien sûr la lenteur des processus bureaucratiques européens, qui freinent le remboursement de sommes considérables dues à l’association. On peut citer aussi la lassitude des Google, Meta et TikTok, alors principaux financeurs de l’association et qui refusent aujourd’hui d’être les seuls à financer la lutte contre les contenus illégaux. Mais d’abord, et surtout, il y cet incompréhensible désengagement de l’Etat, qui refuse après 10 mois de silence de renouveler son financement à l’association. 

40 000 euros. Une somme dérisoire au regard des chiffres alarmants des violences numériques, en croissance exponentielle, et d’un nombre victimes non moins élevé qui sont aussi de plus en plus jeunes : En 2022, l’association recensait 7 437 contenus d’exploitation sexuelle de mineurs, 5 385 de pornographie adulte accessible aux mineurs ou encore +1187% de signalements qualifiés de diffusion non-consensuelle de contenus intimes


Un désengagement d’autant plus difficile à comprendre que le gouvernement a fait de la confiance dans l’espace numérique et de la protection de l’enfance des priorités. En 2022, le Président de la République inaugurait le Child Online Protection Lab, reflet des travaux menés depuis 2018 par Point de Contact pour promouvoir une coopération public-privé dans la mise en œuvre de technologies d’analyse de contenus au service des professionnels de la lutte contre les contenus illégaux. « Point de Contact est fragilisé par la perte d'un financement public alors même que le partenariat public-privé est à l'origine de la création de cette association. » regrette Christian Aghroum, membre honoraire de l’Association. « L’association a été à la fois l’ouvrier et le premier soutien du Lab… avant d’être écarté de son comité stratégique sans explications… » complète Jean-Christophe Le Toquin, président de Point de Contact.  


Ces blocages, ces freins et ces silences, traduisent aussi des luttes d’influence et de pouvoir, les querelles d’égo et des enjeux financiers et politiques qui entourent malgré elle la lutte contre les contenus illicites.


Ne nous trompons pas de combat ! Ce qui est en jeu ici, c’est l’intégrité physique et psychologique de personnes vulnérables. La santé mentale des plus jeunes - mais pas seulement. La détresse de victimes. C’est la confiance de toute une société dans un espace numérique amené à étendre son emprise sur nos vies, privées comme professionnelles. Des enjeux qui imposent de jouer collectif et d’avancer groupés au risque de perdre ce combat existentiel.


Certains semblent l’avoir oublié…


Malgré cela, la combativité et la détermination des équipes de Point de Contact, leur éthique et leur engagement, semblent à toute épreuve : Jean-Christophe Le Toquin, son Président actuel, Mark Pohlmann, appelé à lui succéder, mais aussi Quentin Aoustin, directeur des opérations, Sarah Jane Mellor et Christian Aghroum ainsi que des soutiens fidèles comme Anne Souvira. Une équipe qui n’a eu cesse au cours de ces derniers mois de solliciter le dialogue avec l’exécutif, de rechercher et proposer des solutions, et dont les efforts ont fini par convaincre Google, Meta et Tik Tok d’approuver, à défaut de financer, le plan d’économie proposé par son président : une réduction de la masse salariale et un changement de présidence. 

Une équipe qui aura aussi réussi, faute de rallier l’exécutif, à rassembler autour d’eux le législatif, avec des députés comme Marie-Do Aeschlimann, Philippe Latombe ou Eric Bothorel. Sans compter la mobilisation d’autres acteurs de la confiance et de la sécurité dans l’espace numérique comme l’association Tralalère, qui a accepté de contribuer à financer le plan d’économie pour assurer, dans l’immédiat, la viabilité de l’association pour l’année à venir. 


Résultat : si aux termes de ce mauvais feuilleton Point de contact est fragilisée, l’association et la cause qu’elle défend mais n’ont finalement jamais eu autant de visibilité… 


Une fois l’orage passé, encore faudra-t-il dans la durée assurer la pérennité de l’association. Ce dont elle a vraiment besoin ? « Un exécutif qui joue son rôle, d’abord. Un exécutif qui cesse de jouer le pourrissement, qui accepte le dialogue, car l'Etat aussi a un rôle à jouer dans la protection des citoyens en ligne aux côtés des plateformes et des ONG. » souligne Jean-Christophe Le Toquin. De nouvelles sources de financement ensuite, qui passent par la mobilisation des autres acteurs concernés à commencer par les opérateurs télécoms qui ont démissionné de l’association en 2017. 


Et faire appel à des sources de financements privés d’autres natures, plus compétentes, plus motivées plus engagées, comme le mécénat. C’est la démarche adoptée par le Fonds de Dotation International Digital Peace Funds en redistribuant les fonds collectés lors de la soirée FIC Impact du 29 novembre dernier à plusieurs associations œuvrant pour un numérique responsable et de confiance. Certains comme Rachel-Flore Pardo, avocate et co-fondatrice de l’association Stop Fisha, militent aussi pour « la création d'un fonds qui pourrait aussi être un fonds européen de financement de la lutte contre la haine en ligne, financé par les plateformes et dont les fonds seraient redistribués aux acteurs de la société civile par une autorité indépendante pour les protéger de tout risque de dépendance vis à vis des plateformes » .


Il faudra aussi continuer à faire progresser la prise de conscience collective de l’ampleur de ce fléau et de l’urgence d’y apporter une réponse collective. C’est pour cela qu’Impact for the Future se mobilise aujourd’hui. Engagés de longue date pour la protection de l’enfance et la promotion d’un Internet sur et de confiance, nous avons relayé la mobilisation des acteurs de la société civile comme Point de Contact, Caméléon, Génération numérique ou IWas, mis en lumière l’action des forces spécialisés de police et de gendarmerie nationales et internationales, mais aussi l’engagement de fournisseurs de technologies essentielles à la lutte contre la haine en ligne comme Aleph ou Aeteos. Nous avons sensibilisé à l’ampleur grandissante des violences numériques, en particulier contre les mineurs. Aujourd’hui, nous alertons de la mise en danger d’un maillon essentiel d’un Internet sûr et de confiance et de la protection de l’enfance en ligne. C’est un devoir pour un média éthique et engagé.


Sur le plus long terme, il s’agira aussi de réincarner, de réhumaniser le combat contre les contenus illicites. « Nous avons toujours mis en avant les « contenus illicites », c’est indispensable mais c’est très désincarné. Ca n’est pas évocateur, ni mobilisateur. Notre mission concrètement, c’est la protection des internautes, des citoyens, des personnes. » rappelle Jean-Christophe Le Toquin. Car la question n’est pas juste celle de la licéité ou de la légalité des contenus, elle n’est pas seulement juridique ou technique. Derrière ces contenus, et face à eux, ce sont autant d’êtres humains, d’enfants, qui les produisent et les reçoivent. Ces contenus ne sont pas seulement illicites. Ils sont choquants. Violents. Abjects. Traumatisants. Parfois vitaux. Le vrai combat est là et c’est à nous, tous, de nous mobiliser pour permettre à Point de Contact de continuer à le mener, pour notre bénéfice, à tous.

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