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Lutter contre la récidive : c’est possible !

Dernière mise à jour : il y a 3 jours

En France 1 sortant de prison sur 3 récidive dans l’année de sa sortie et 2 sur 3 dans les cinq ans. La France compte aujourd’hui 79 000 détenus et 170 000 condamnés en milieu ouvert… Pour préparer la sortie et prévenir la récidive des ex-détenus, ils ne sont que 6000 professionnels sur le sol national. Les associations se mobilisent pour pallier ce manquement, avec le soutien d’entreprises, de magistrats et de citoyens engagés. Résultats à l’appui : relever le défi est possible !


©  Tima Miroshnichenko
© Tima Miroshnichenko


Faire chuter le taux de récidive


C’est la mission de Wake Up Café (WKF). Une association née du constat réalisé par Clotilde Gilbert, aumônier de prison, qui pendant 7 ans, a rencontré des personnes détenues à la maison d’arrêt de Nanterre. Elle le voit, l’enfermement et l’inaction désocialisent et déshumanisent la personne. Or, l’immense majorité d'entre elles sortiront un jour de prison et devront alors retrouver une vie sociale et professionnelle. Reprendre confiance en soir pour devenir des acteurs positifs de la société est alors essentiel. « Changer de parcours dès la sortie de prison, c’est avant tout choisir de retrouver de l’autonomie, de la respectabilité et un cadre de vie. Pour des personnes éloignées de l’emploi, avec peu voire pas d’expériences professionnelles, c’est quasiment impossible, en dépit du travail considérable des différentes administrations en prison et à la sortie. Un CV sans expérience, avec la case prison, n’est pas celui du candidat rêvé ! L’emploi est clé pour sortir du cercle infernal de la récidive, mais les entreprises ne sont pas équipées, ni organisées pour former et accompagner les anciens détenus. » témoigne un collectif d’entreprises engagées auprès de Wake Up Café dans une tribune libre et d’ajouter : « Nous, dirigeants d’entreprise, devons jouer un rôle aux côtés de l’Etat et des associations au service de la réinsertion des anciens détenus. »

10 ans après sa création, l’association a d’ores et déjà accompagné près de 2300 personnes. 88% ne sont pas retournés en prison. « Privé de liberté, c’est là que j’ai appris beaucoup sur moi-même et que j’ai eu mon déclic. Grâce à ma double expérience, j’en suis sorti renforcé, et aujourd’hui le projet digital est lancé. » témoigne Tally, accompagné par WKF.

Des programmes ancrés dans la réalité

L’accompagnement passe par plusieurs programmes. Le parcours de réhabilitation permet de rejoindre une communauté d’entraide et exige un véritable engagement de la part du détenu. « Il faut avoir envie de s’en sortir, de changer de vie et demander de l’aide pour y arriver, mais aussi renoncer aux choix qui ont conduit à la détention pour prendre un nouveau cap ensemble. Cela implique de s’engager dans un parcours exigeant et bienveillant. » témoigne l’association. Le programme Insert’up déploie un parcours dedans-dehors visant la remobilisation et l’accompagnement vers une réinsertion durable : 2 mois dedans et un accompagnement de 12 mois dehors. L’objectif étant de préparer les détenus à leur sortie et de les accompagner vers un emploi dans une entreprise partenaire pour lequel ils auront été formés pendant leur détention, tout en accompagnant les entreprises à ce type d’embauche. Le programme accompagne plus de 600 personnes : 90% des bénéficiaires allant jusqu’au bout de la formation sont diplômés et 65% trouvent un emploi en sortie ou 3 mois après la fin du parcours d’accompagnement. L’ambition : réduire le taux de récidive à 10% sur les 852 bénéficiaires accompagnés, à 1 an et à 3 ans. Ce programme est financé dans le cadre du Plan d’Investissement dans les Compétences du Ministère du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion et piloté par un consortium porté par Wake up Café en partenariat avec Eloquentia et Kimso. « Nous pouvons offrir des opportunités de formation et de compréhension du monde du travail : que ce soit par l’engagement de nos collaborateurs grâce au mécénat de compétences (avant et après la sortie de prison), par des financements, ou encore par la sensibilisation de nos managers pour leur permettre de relever ce défi d’embauches. » témoigne le collectif d’entreprises.

Wake up Café est présente sur 10 sites en France. Le travail se fait en étroite collaboration avec le Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation (SPIP) de chaque région. Ishak a par exemple participé à l’ouverture de Wake up Sèvres en 2021. Accompagné jusque-là à Paris, il a intégré la brigade du Quai Liberté quelques mois plus tard. Il est depuis en CDI et a obtenu un placement extérieur clôturant sa semi-liberté.


Poursuivre l’action en 2025


L’association ambitionne de créer un organisme de formation pour permettre aux wakeurs de suivre des formations spécifiques tout au long de l’année, et accéder aux savoirs de base. En détention, le projet Digit’up est porté par Majorel, acteur international de gestion de la relation client, qui souhaite renforcer son impact sociétal en créant un parcours pilote de travail en détention pour une population très éloignée de l’emploi. En 2025, Wake Up Café entend accompagner plus de 800 nouveaux wakeurs, finaliser 6 études de faisabilité lancées pour l’ouverture de sites dans de nouvelles villes et trouver une autre maison à Paris, Marseille et Lyon pour répondre aux besoins grandissants d’accueil. L’association souhaite déployer son parcours « des Hommes et des Femmes DEBOUT », en prison, sur les sites et auprès des équipes WKF grâce à aux équipes de formateurs, dont la majorité a connu la détention.


Tous concernés, tous acteurs


Ils sont en effet 6000 chargés de suivre 79 000 détenus, de préparer leur sortie, mais aussi 170 000 condamnés en milieu ouvert, hors les murs. Mission impossible. Au-delà de la sévérité des peines et des places de prison supplémentaires appelés des vœux de certains, investir sur le suivi, l’accompagnement et la préparation à la réinsertion est un enjeu de société fort, y compris économique : « Je le dis souvent : pour 100 personnes accompagnées proche de chez vous, c’est 100 délits en moins proche de chez vous. C’est plus de 100 vies qui changent. » témoigne Clotilde Gilbert sans compter le coût public de la récidive estimé à 1,4 milliard d’euros par an qui pourrait ainsi être considérablement réduit. « Nous sommes convaincus que cet accompagnement rapproché, tel que le propose Wake up Café, depuis 2014, allié aux forces de l’entreprise et de la Justice, contribue de manière efficace à transformer le paysage social de notre pays et que cette action s’inscrit pleinement dans notre responsabilité sociétale. » soutient le collectif d’entreprises, parmi lesquelles Accor, Iliad, AXA, Cafés Richard, Animalis ou encore le mouvement Les entreprises s’engagent. Une autre manière de redonner aussi espoir en l’avenir de la Justice, en ces temps de défiance : « Les partenariats permettent d’offrir des projets professionnels au plus près des besoins, compétences et envies des wakeurs, nécessaires à leur adhésion, et donc à leur réussite. La cohabitation de partenaires aussi variés que des associations, des institutions étatiques, de grandes et plus petites entreprises privées, est assez inédite dans le monde judiciaire. Ce fonctionnement est à la fois enthousiasmant, de par les opportunités qu’il laisse entrevoir, et rassurant en ce qu’il permet de constater que la question de la réinsertion intéresse bien au delà de la Justice et de ses partenaires habituels. A l’heure où la confiance en la justice serait en crise, espérons que Wake up Café puisse continuer à donner confiance en la réinsertion et espoir en l’avenir de la justice. » déclare Thibaut Gosset, magistrat et membre du Conseil des Sages de l’association.

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