Transition écologique : quand la jeunesse montre la voie
- camilleleveille8
- 4 sept.
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Face à l'urgence climatique, plusieurs initiatives émergent pour rendre la transition écologique plus inclusive. À Saint-Ouen, dans le Gers ou dans les Hauts-de-France, des projets comme Banlieue Climat, le réseau des Écoles de la transition écologique ou GEAR UP misent sur la formation, l’ancrage territorial et l’engagement des jeunes. Une autre écologie s’invente, plus accessible et plus concrète.

Banlieues climat : de l’importance de la sensibilisation
À seulement 20 ans, Féris Barkat cofonde Banlieues Climat. Alors qu’il menait ses études à la London School of Economics, sa mère tombe malade pour des raisons environnementales. Il abandonne ses études à Londres pour se consacrer pleinement à son association. L’idée de Banlieues Climat ? Pour que la transition écologique fonctionne, tous les citoyens doivent être embarqués, y compris ceux issus des banlieues. Depuis, une école populaire a été créée à Saint-Ouen. Après plusieurs heures de formation en itinérance, la mairie de la ville du 93 a mis à disposition un local dans lequel les fondateurs de Banlieues Climat ont pu ouvrir leur centre de formation. « On a donc créé une formation de huit heures, qui est certifiée par le ministère de l’enseignement supérieur. Sur le fond, on doit être irréprochables : parler du permafrost, des ours polaires… avoir un bagage scientifique. Par contre, sur la forme, on veut lever les barrières de l’éducation classique, venir avec notre manière d’être, notre propre identité. C’est ce qui fonctionne. C’est pour ça qu’on a touché plus de 200 jeunes en deux ans. L’idée c’est de rendre visibles les enjeux écologiques, et d’utiliser l’écologie comme un prétexte pour accéder à d’autres questions politiques. Pour faire ça, on mise sur la formation par les pairs : « Si tu me ressembles, tu vas pouvoir m’expliquer et je vais t’écouter. » On mise aussi sur l’adhésion sur la forme : être dans une ambiance cool, familiale. On ne dit pas : « intéressons-nous à la question de la mobilité», mais plutôt : « et si on faisait Saint-Ouen-Marseille à vélo ? ». Et c’est ce qu’on a fait, avec un groupe de 14 jeunes, en juillet 2024 » explique Féris Barkat et d’ajouter : « On a aussi mené une action en mars au Palais de Tokyo. Là, je n’ai pas dit aux jeunes : « on va au musée, parler de l’inégalité de l’accès à l’art, qui a été démontrée par Bourdieu dans La Distinction »…. Non, j’ai proposé de rentrer dans le musée par effraction ! c’était une fausse effraction. L’idée c’était qu’on rigole, qu’on visite l’exposition de l’artiste Mohamed Bourouissa, et qu’on puisse discuter avec lui. C’est comme ça que l’adhésion se fait, sur la forme plutôt que sur le fond. »¹ D’autant que Féris tient à le rappeler : les populations les plus précaires sont les plus exposées au dérèglement climatique. L’exposition répétée à des produits toxiques pour les femmes de ménage, la pénibilité du travail en plein air sous des fortes chaleurs pour les ouvriers ou encore le manque d’accès à une alimentation saine pour toutes les populations issues de banlieue sont autant d’exemples de la vulnérabilité particulière auxquelles sont confrontées les populations issues des quartiers prioritaires. Les activités de Banlieues Climat se poursuivent d’ailleurs hors des frontières françaises. Formations, plaidoyer et partenariat ont aujourd’hui lieu au Maroc et en Allemagne, avec toujours le même enjeu : sensibiliser, donner confiance et mobiliser.
Ecoles de la transition écologique : un nouveau système d’enseignement
Chaque année, en France, 100 000 jeunes sortent du parcours scolaire sans diplôme et sans solution. Le réseau ETRE veut changer la donne en combinant sensibilisation écologique et formation concrète, le tout gratuitement et pour les jeunes. Chaque école départementale a sa spécialité. « L’idée est de permettre aux jeunes de trouver de l’emploi sur leur territoire, donc chaque école a sa spécificité. Ici, dans le Gers, on est sur la menuiserie et la rénovation durable, avec toutes ces vieilles bâtisses du Gers qui ont des besoins dans ces domaines, explique la coordinatrice. Le département est également reconnu pour ses terres agricoles, donc on mise sur le maraîchage durable. Et enfin sur la mobilité douce, parce qu’on est à côté de L’Isle-Jourdain, terre de vélo. » explique Sandie Colleu, coordinatrice de l’école de de Monferran-Savès.² Sa passion pour la menuiserie a poussé Anna, 20 ans, à venir dans cette école pas comme les autres. « Je suis venue ici parce que je voulais mettre les mains dans la terre, faire un métier manuel et en apprendre plus sur l’écologie. Aujourd’hui, ce qui me passionnerait serait de faire un stage dans le métier du bois », témoigne-t-elle.³ En 2024, plus de 1000 jeunes ont été formés dans l’une des 33 écoles du réseau ETRE et 92 % d’entre eux sont soit en emploi, en formation qualifiante, en apprentissage, en service civique, en stage ou engagés dans un projet pour préparer leur retour vers l’emploi.
La région des Hauts-de-France rejoint le réseau GEAR UP
Soutenu par l’Union européenne, GEAR UP entend renforcer l’implication des jeunes dans la transition écologique locale. La région Hauts-de-France a rejoint l’initiative en finançant 9 projets associatifs pour un total de 152 000 euros. Grâce à cela, plus de 250 jeunes pourront s’engager pendant plusieurs mois au service de la transition écologique de leur territoire. Des centaines d’autres pourront bénéficier des actions mises en place. Parmi les projets soutenus : celui du centre social d’animation culturelle de Hirson avec lequel une quinzaine de jeunes seront amenés à contribuer à un changement des modes d’habitation de la commune avec un focus porté sur la sobriété et la seconde vie des déchets. À Amiens, des jeunes préparent un événement sur l’économie circulaire, présenté aux élus dans le cadre du budget participatif. Sur un tout autre sujet : le projet « ECHANGES - Élus et Citoyens en Harmonie pour un Aménagement Naturel et une Gouvernance Écologique et Solidaire » a un objectif clair : mobiliser 4 à 5 communes de l’agglomération de Valenciennes et une vingtaine de jeunes pour lutter ensemble contre la fracture démocratrique freinant l’appropriation des citoyens aux enjeux de transition écologique. Un dialogue sera alors instauré entre les jeunes et les élus devant permettre l'émergence de projets locaux. Ces initiatives, portées par et pour les territoires, rappellent qu’une transition écologique réussie passe par l’inclusion, la pédagogie et l’action locale.
³Ibid




