Santé mentale des jeunes : un défi global, des réponses locales

Selon l’OMS, un être humain sur quatre souffrira, au cours de sa vie, d’un trouble psychique ou d’un épisode pathologique. Si, en France, la santé mentale est la grande cause nationale de cette année 2025, partout dans le monde, de nouvelles initiatives essaiment pour offrir aux jeunes des outils de résilience, de prévention et d’expression. Tour d’horizon d’un engagement mondial pour favoriser la santé mentale de notre jeunesse.

© Freepik

L’art : un remède universel

Aux États-Unis, Marney Schorr, art-thérapeute et ancienne personne suicidaire, a développé un programme, Arts in Recovery for Youth, dédié aux jeunes de 13 à 24 ans pour prévenir le suicide. Gratuit, il se concentre sur le développement créatif des jeunes grâce à l’art, sur le soutien par les pairs et la thérapie comportementale. Une étude réalisée pendant 3 ans auprès de 16 adolescents et 13 jeunes adultes a révélé que 55 % des sujets avaient réalisé au moins une tentative de suicide avant le début du programme. Après seulement 2 mois de participation, ce risque était réduit de 77 % et de 95 % après un an de participation. Les jeunes déclarent une diminution significative des pulsions d’automutilation, une réduction du sentiment de désespoir et de haine de soi. Participer à ce programme leur offre un cadre rassurant, où ils se sentent appartenir à un groupe. Après la fin du programme initial, les jeunes participants peuvent accéder à d’autres groupes d’art-thérapie.

En avril dernier, le célèbre pianiste Lang Lang a lancé une initiative inédite baptisée Music Heals, “la musique guérit”. Le but ? Soutenir les jeunes qui traversent des périodes difficiles grâce à la musique. À Londres, le programme vise à utiliser la musique comme un outil de soutien émotionnel. Grâce à des concerts, des séances interactives, des espaces créatifs, le programme se concentrera d’abord sur des thématiques précises : le deuil, les soins palliatifs, la santé mentale des enfants, ainsi que le rôle de la musique dans le bien-être général. « J’ai senti qu’il fallait faire quelque chose pour les aider. La musique est pour eux une passion, mais parfois, ils rencontrent des problèmes qui vont au-delà de leur état de santé habituel. La musique est le meilleur remède pour perdre cette tension ou la peur qu’on a dans le cœur et l’esprit, et pour surmonter complètement toutes ces difficultés », souligne le virtuose.

En 2021, 70 citoyens français se sont réunis autour d’une envie commune : faire évoluer les récits sur la santé mentale des jeunes. Comment ? En créant, chaque année, un festival autour de cette question. Entre ateliers de sensibilisation, concerts, prises de parole ou encore stand-up, le Facettes Festival est le rendez-vous incontournable pour prendre soin de sa santé mentale. En 2024, il a réuni 250 intervenants et 2 000 participants à la Cité Fertile de Pantin. Tout au long de l’année, Facettes collabore avec d’autres organisations pour porter les sujets de santé mentale auprès du grand public.

Quand le numérique devient une main tendue

Aux quatre coins du monde, des initiatives utilisant le numérique comme moyen de favoriser la santé mentale des jeunes essaiment. Fanafana – Chat for Change propose un service de chatbot à destination des jeunes LGBTQIA+, contribuant ainsi à améliorer leur santé mentale. Le chat met en relation les jeunes avec des personnes et des lieux qui peuvent aider, et partage des histoires similaires à celle qui est racontée, pour se sentir moins seul. Les équipes ont travaillé avec des professeurs d’université et des psychologues spécialisés en santé mentale pour écrire et concevoir toutes les réponses fournies par l’intermédiaire du chat.

En Finlande, The World of Recovery est un jeu mobile conçu pour toute personne qui se rétablit d’une maladie mentale ou de toxicomanie. L’idée ? Soutenir le parcours du joueur vers le rétablissement complet via des quêtes qui lui sont proposées, encourageant le joueur à être actif. Au fur et à mesure que le joueur progresse, le personnage passe des niveaux et avance dans l’aventure et l’histoire du jeu. Mille personnes ont déjà joué et, parmi ceux qui ont passé le niveau 3, plus de 90 % ont déclaré que le jeu favorisait leur bien-être.

Former et informer dès l’enfance

L’Inde compte plus de 450 millions d’enfants et la plus grande population d'adolescents au monde. Avant même la pandémie de Covid-19, 50 millions d’entre eux étaient en prise avec des problèmes de santé mentale. Mpower, pionnier dans l’introduction de programmes de santé mentale dans les écoles, a développé le programme Minds Matter dans les écoles de plusieurs régions du pays. Incluant enseignants et élèves, l’initiative s’articule autour de concepts comme la psychologie positive, l’apprentissage socio-émotionnel et la sensibilisation à la santé mentale. Les parents sont également partie prenante puisque, tout comme les enseignants, ils participent à une formation pour être plus réceptifs aux réactions émotionnelles des enfants et leur permettre de repérer rapidement les signaux d'alarme. Résultat ? Les élèves s’expriment plus, demandent de l’aide lorsqu’ils en ont besoin et ont appris à utiliser des mécanismes d'adaptation pour faire face à l’anxiété et à l’échec. À long terme, de telles initiatives leur permettent non seulement de meilleurs résultats scolaires, mais aussi de développer des relations sociales plus saines.

Au Canada, le livre Promouvoir la santé mentale et le bien-être à l’école sensibilise les équipes éducatives à la santé mentale des enfants et adolescents qu’elles rencontrent dans le milieu scolaire. S’il s’agissait initialement d’un essai clinique, le livre a été transformé en un véritable guide pratique. Il vulgarise les connaissances à détenir, propose des clés pour soutenir la santé mentale, pour gérer les comportements difficiles, et promeut le bien-être des élèves à l’école.

En Guadeloupe, la formation “Premiers secours en santé mentale” a récemment fait son apparition. Créée dès 2000 en Australie et développée depuis 2019 dans l’Hexagone, l’initiative propose une formation généraliste pour se sensibiliser à la santé mentale. S’adressant à tous les citoyens, l'objectif premier est la déstigmatisation et la lutte contre la minimisation de ce fléau qui prend de plus en plus d’ampleur. À la fin de la formation, le secouriste en santé mentale doit être en capacité d’écouter, de rassurer et d’accompagner la personne qui en a besoin. Il détient ainsi des méthodes pour intervenir sur les troubles dépressifs, anxieux, psychotiques, et ceux liés à l'utilisation de substances. Un module “Jeune” a été spécialement développé pour les personnes travaillant ou vivant avec des adolescents et des jeunes majeurs.

Enjeu sociétal mondial, la santé mentale de nos jeunes doit aujourd’hui nous préoccuper et pour cause : les jeunes d’aujourd’hui sont les adultes de demain…